Rive-Gauche du Rhône à Lyon : la Buire, Histoire en Continu

Maud ROY

 

ÉCOLE  des  MUTILÉS  de  GUERRE

suite : étudiantes

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Durant les premiers mois de 1914, les choses en restent là. Et soudain la guerre éclate en septembre 1914 et commencent avec elle des combats terribles dont un des premiers fut celui dit la Bataille de la Marne. Les pertes sont effroyables et l’utilisation des obus provoquent un nombre en constante augmentation de mutilés de guerre.

Ces premiers mois touchent de manière profonde Edouard Herriot. Il souhaite faire quelque chose pour ces jeunes hommes dont la vie est totalement transformée. Il écrit un rapport à ce sujet et le dévoile lors du conseil municipal du 30 novembre 1914. Il propose la création d’une école pour que les soldats mutilés, à l’image de la ville de Charleroi en Belgique et de la Scandinavie, où les blessés de guerre, et plus précisément les amputés, puissent apprendre une profession pour assurer leur existence. Il demande pour cela l’aide de l’Etat et des institutions lyonnaises. La mairie de Lyon fonde deux écoles, l’une dans le 5e arrondissement, Tourvielle, et la seconde au 41 rue Rachais, dans les bâtiments d’habitation de la Buire.

Conseil d'Administration de l'école.

L’école ouvre le 11 décembre 1914, le Conseil d’Administration de l’école du 41 rue Rachais comprend 6 médecins, 6 industriels dont le président de la chambre de commerce et 5 élus, dont le maire, des conseillers municipaux dont Etienne Richerand et le conseiller général Faurax. Etienne Richerand, à cette époque, n’est que conseiller municipal, c’est une quinzaine d’années plus tard qu’il deviendra adjoint chargé notamment du Bureau de Bienfaisance, plus tard il sera élu député pour la 4e circonscription du Rhône. Cet homme socialiste et humaniste a voué toute sa vie aux pauvres gens de son quartier.

Au commencement de sa mise en place, le Conseil d'Administration se rend compte que l'école n’a pas de nom  ; le maire a l’idée de proposer au général Joffre de donner son nom à cette école par courrier du 22 septembre 1915. Edouard Herriot s'exprime en ces termes :

« Je vous serai reconnaissant, Monsieur le Général, si vous voulez bien ne pas faire obstacle à notre désir qui est de placer, au seuil de notre maison, sous le drapeau national, le nom, respecté et aimé, du plus illustre Soldat de notre France ».

Le stratège de la bataille de la Marne accepte et la Buire s’appela désormais l’École Joffre.

télégramme du maire Edouard Herriot.

Du point de vue des enseignements dispensés, les soldats avaient des cours de matières générales et étaient dans des formations professionnalisantes en relation étroite avec des artisans ou des industriels ce qui leur ouvrait des emplois à coup sûr. Il y avait 10 ou 9 filières suivant l’époque et les besoins, les comptables et les cordonniers étaient les plus représentés. Le terme de papetiers correspond à des relieurs ou brocheurs.

Tous les élèves étaient proposés à la médaille militaire et tous l’obtenaient.

Etat nominatif des soldats élèves à l'école professionnelle des blessés.

Ce tableau représente les élèves proposés à cet ordre militaire faisant partie de la filière comptabilité. Il permet de constater que si tous n’étaient pas amputés, d’un bras, d’une jambe, ils avaient tous subi de graves traumatismes. Certains étaient des poly-traumatisés comme le soldat Marcel M. du 156e d’Infanterie amputé de la jambe droite et d’un doigt de la main droite. D’autres avaient des blessures graves sans être amputé comme Antonin R. du 105e d’Infanterie dont la colonne vertébrale avait reçu des éclats d’obus.

Il existe quelques cartes postales ayant comme sujet les ateliers des mutilés de guerre, notamment ceux des tailleurs et des brocheurs-relieurs.

"Les élèves" relieurs-brocheurs

L’École Joffre fonctionnait bien et permettait aux mutilés de reprendre une place dans la société grâce aux enseignements qui étaient donnés. La bonne gestion permettait d’accueillir de nouveaux élèves tandis que d’autres trouvaient des places. Edouard Herriot fut nommé président d’honneur de l’école des soldats mutilés fondée par le ministère de l’armement durant les premiers mois de l'année 1917. Mais dans le même temps, le ministère de l’armement envoya un contrôleur général sans prévenir Edouard Herriot dont les conclusions ne lui furent pas communiquées ce qui provoqua une grande colère du maire. Et le 21 juillet 1917, Edouard Herriot démissionna de la présidence d’honneur et l’école Joffre fut supprimée, les mutilés furent envoyés dans une école de l’armée.